AVIS DE PASSAGE
Friche la Belle de Mai
Tour, 5e étage – 41 rue Jobin – 3e
Du 12 novembre 2021 au 13 février 2022
Les avis de passage que l’on retrouve parfois punaisés à notre porte signalent qu’un rendez-vous fut manqué tout en offrant une nouvelle possibilité. C’est la revanche du futur sur le passé. L’art n’est au bout du compte que cela, des avis de passage sur la terre, des traces laissées derrière nous bien plus que des significations, des messages.
Pour concevoir cette exposition, nous avons dans un premier temps emboîté le pas au poète philosophe Walter Benjamin et à son Livre des passages. C’est après avoir passé clandestinement la frontière espagnole pour fuir l’horreur des camps en septembre 1940, qu’il perdit ses derniers manuscrits et sa vie. Chemin d’un chassé-croisé d’exils d’hier et d’aujourd’hui.
L’hypothèse qui a servi de feuille de route à cette exposition, c’est que les clés qui ouvrent les passages, ce sont les passions amoureuses, poétiques et révolutionnaires. C’est ainsi que nous vous invitons à flâner parmi ces œuvres de passage, sans intention, disponibles à tous les imprévus. Tous les passages contiennent des fausses pistes. Il faut se méfier des balisages. N’entrez pas dans ce dédale sans désir.
Ralph Rumney / Joseph Marendo (France)
Portrait photographique du situationniste Ralph Rumney, le père de la psychogéographie (1957). Il vécut plusieurs années à Manosque où naquirent les Instants Vidéo. Il y mourut quand notre festival fut contraint à l’exil marseillais.
« La psychogéographie se préoccupe du rapport entre les quartiers et des états d’âme qu’ils provoquent. Venise, comme Amsterdam et le Paris d’antan, se prête à plusieurs possibilités de dépaysement. » Invitation à dériver, à flâner dirait Walter Benjamin. C’est ainsi que nous vous proposons de vous aventurer dans l’exposition « Avis de passage » des Instants Vidéo.
Désir (2016) / Richard Skryzak (France)
Le Désir peut-il encore s’exprimer de nos jours comme pur Désir ? Il est pour moi le maître-mot de la création artistique, comme de la vie tout court. C’est pour cela que je l’ai inscrit dans un ciel de nuit à l’aide de traces d’avions combinées à la lune. Pour qu’il continue de nous éclairer de ses multiples résonances. Avant de s’effacer comme ces traces de craies sur le tableau noir. Je crois sincèrement que le Désir est en danger. Et que la création est un des moyens qui s’offrent à nous de le sauver.

Iskra, et bientôt l’étincelle embrasera la prairie (2017) / Pascale Pilloni
(France)
En son temps, Iskra (en russe, l’étincelle) fut le titre du journal fondé par le révolutionnaire bolchevik Vladimir Ilitch Lénine. Il suffit parfois d’une étincelle pour qu’un peuple en colère s’embrase, s’embrasse, embrasse une cause. Et soudain, plus rien ne peut être comme avant. Il en va des révolutions comme du désir qui embrase des corps. État amoureux qui pour un certain temps ne concerne que deux amants : un brasier dans un désert. Mais qui parfois, comme par contagion, soulève une multitude de corps. Un nouveau paysage apparaît parsemé de petites boîtes d’allumettes prêtes à s’enflammer. Les corps saisis d’un ardent désir sont des volcans qu’aucun rempart ne peut contenir.
Il tempo consuma (1978-2021) / Michele Sambin (Italie)
En 1978, j’ai réalisé Il tempo consuma en mettant en boucle la vidéo avec un procédé que je venais d’inventer.
En 1980, pour la Mostra “Camere incantate” au Palazzo Reale de Milan, j’ai créé une installation qui met en jeu une série de vidéo réalisées avec cette même technique de boucles.
En 2021, je reprends quelques unes de ces vidéo historiques, pour créer une nouvelle installation immersive en les adaptant aux possibilités offertes par les technologies actuelles.
Cette nouvelle version, tout en conservant l’idée originale, propose une digression technico-poétique de l’analogique vers le numérique.
« Michele Sambin: Arché/Techne » est un projet du Cineclub Canudo, soutenu par le Ministère de la culture italien, dans le cadre d’un programme du Directorate-General visant à promouvoir l’art contemporain dans le monde.

Wasser (2021) / Marie-Pierre Bonniol (France – Allemagne)
Wasser est une série de cinq courts films expérimentaux sur l’eau et ses états, la force hydraulique (Wasserkraft), la transformation du flot en énergie et les dispositifs de métamorphose. Réalisés à l’iPhone seulement, les films qui composent Wasser ont été principalement écrits au moment de leur montage, à partir de plusieurs milliers de rushes et d’images également réalisés par d’autres personnes. Filmé principalement en France, en Allemagne, en Islande et en Suisse en 2019, Wasser invite au transport au travers les différents états de l’eau. La série invite également à observer ses transformations, dans une écriture analogique qui porte aussi sur la transformation de la production de subjectivité en production d’œuvre, et généralement la transformation du courant en puissance. Avec un regard venant de l’Esthétique, mais également extrêmement contemporain sur la destruction de l’écosystème et la transformation des réseaux de l’eau, la réalisatrice continue par ce film sa recherche sur ce qui permet, ouvre et oriente les transformations, avec également un intérêt prononcé pour l’archéologie des machines, des médias et des mécanismes de projection. Une production Studio Walter (Berlin). Avec le soutien du Goethe Institut de Marseille.

Haschich à Marseille (2021) / Renaud Vercey (France)
« Il ne faut pas dire que le passé éclaire le présent ou le présent éclaire le passé. Une image, au contraire, est ce en quoi l’Autrefois rencontre le Maintenant dans un éclair pour former une constellation. » Walter Benjamin – « Paris, capitale du XIXème siècle »
Un espace immersif visuel et sonore proposent de revivre la déambulation du philosophe allemand Walter Benjamin à Marseille les sens aiguisés par le haschich, en 1928 dans une ville cosmopolite et résolument moderne. Dans les mêmes années le cinéaste Laszlo Moholy-Nagy évoque dans le documentaire Marseille, Vieux-Port, les mêmes images que dans le texte de Benjamin en particulier cette nouvelle vision sur la ville permise par le pont-transbordeur qui trône alors dans la perspective de la Canebière.

Pasos (Frontières) (2009) / Olivier Moulaï (France)
« Honorer la mémoire des anonymes est une tâche plus ardue qu’honorer celles des gens célèbres. L’idée de construction historique se consacre à cette mémoire des anonymes. »
Une installation sur les traces du chemin de l’exil de Walter Benjamin en offrant la parole à d’autres récits d’exil.

Camille (2021) / Brigitte Valobra (France – Espagne) & Wald (Tunisie – Espagne)
Outre un hommage à la « Jeune femme aux yeux clos » (1885) de Camille Claudel (buste aux épaules nues en terre cuite, regard intérieur), nous avons tenté, dans un mouvement très lent frisant l’immobilité de la sculpture et dans une lumière transparente, de rendre la vibration de cette oeuvre par-delà le temps et d’évoquer le trouble provoqué par les circonstances du début 2020, confinement strict de la Catalogne…, en parallèle sous-jacent avec l’isolement mental de l’artiste.
The Crossing (2021) / Andrew Johnson (USA)
The Crossing s’intéresse à l’instabilité de la liberté, à la fragilité de la démocratie, à la précarité de l’esprit révolutionnaire et à la vulnérabilité de la mémoire.
The Crossing est dédiée à tous ceux qui ne sont plus libres de lutter.
The door (8’ – 2020) / Hasan Daraghmeh (Palestine)
« Le processus, c’est le projet, c’est la production, c’est le produit de la répétition, de l’accumulation, puis de l’effacement. Comme une composition minimaliste, nous (pensons) savoir où cela va, et une partie de la fascination réside dans le fait que nous devons découvrir si notre prédiction est correcte. Les portes s’ouvrent et les portes se ferment. C’est quelque chose qui est à la fois réel et métaphorique. Notre connaissance du temps et de l’espace se construit ainsi. La répétition et le rythme sont des structures proches du cœur des choses. Le battement de notre cœur aussi longtemps que nous vivons. La succession des jours et des nuits, des nuits et des jours, et les saisons au cours desquelles ces jours et ces nuits se produisent. Construction et déconstruction. Au fur et à mesure que l’écran se remplit de petites cases, une sorte d’architecture se construit. Ensuite, il est systématiquement dé-construit. Le film doit se répéter sans fin, les processus ne s’arrêteront pas. Le public peut être médusé, en quelque sorte hypnotisé, s’il s’abandonne à la logique interne de l’œuvre, s’il donne le temps qu’il faut pour que l’œuvre prenne son temps. » Jérémy Gallois

Timeline (2021) / Hamza Kırbaş (Turquie)
Les évènement qui se passent dans le monde dans lequel nous vivons et les relations que nous fabriquons avec ces évènements fabriquent notre mémoire. Notre mémoire n’est pas une structure que nous créons de manière individuelle, seul. Les liens que nous construisons avec la nature et avec les autres ont aussi une influence sur la construction de notre mémoire. Ainsi, elle ne peut être dissociée des transformations économiques, sociales, culturelles et politiques.
Une œuvre inspirée par les travaux du sociologue Maurice Halbwachs pour qui la mémoire collective est le propre du groupe. Il affirme que toute communauté organisée engendre une mémoire qui est la sienne propre. Ayant analysé, dans ses premiers travaux, différents types de groupe (le cercle familial, la classe sociale, la profession, l’institution), il a montré que leurs membres produisent, puis partagent un ensemble commun de souvenirs. « [L’individu] serait capable, explique-t-il, à certains moments de se comporter simplement comme le membre d’un groupe qui contribue à évoquer et entretenir des souvenirs impersonnels, dans la mesure où ceux-ci intéressent le groupe »
Play it again Nam (Un portrait de Nam June Paik) (30’ – 1990) Jean-Paul Fargier (France)
Vidéo et costume original de Nam June Paik (inventeur de l’art vidéo)
Un portrait du pape de la vidéo, de ses expériences visuelles et musicales jusqu’à ses récents robots-vidéo. Un portrait tourné à Séoul, à New York, Boston et Cincinatti. D’où vient Paik ? Où va Paik ? Paik est-il impec ? Musique Ulrich Lask.
La traversée du rail (2014) / Robert Cahen (France)
Cette vidéo montre dans un tumulte de moteurs le ballet des vélos, des motocyclettes et des piétons à un passage à niveau en Chine. La présence centrale et stable d’un rail quasi désert en contraste du défilé incessant des personnes et des véhicules crée une partition de l’image entre la fixité de la caméra et le sentiment d’éternel passage, de flux, que soutient un montage en boucle à peine visible.

Sign (10’35 – 2021) / Robert Cahen (France)
Musique André Bon (Four Doors)
De Four Doors, André Bon écrit « Ces portes s’ouvrent sur quatre paysages sonores qui expriment dans l’ordre: la tension, la détente, l’attente, l’extase.
De Sign, Robert Cahen écrit : « Respiration symphonique en quatre mouvements où musique et sensualité des images par glissements subtils s’offrent en contrepoint. Petite histoire d’une rencontre à déchiffrer.
Haïku With Suspended Time / Eleonora Manca (Italie)
Trois haiku vidéo qui – comme les pages d’un journal intime fait d’images, de sons et de mots – marquent une nouvelle ère. (Not Now), The Curfew Hour, Little Relief Archive.

En attendant que le vent tourne (2019) / Esmeralda da Costa (Portugal – France)
Un triptyque monté en trois actes, selon un temps non linéaire mais cyclique. La vidéo met en scène des protagonistes d’une altérité radicale : le vent, l’eau, le feu et la terre se soulèvent et accusent les traces d’un monde humain dont les déchets stagnent à la surface des flots. Miroir impossible, notre rupture avec la nature semble consommée, alors Esmeralda Da Costa tente de communier avec les éléments, en se faisant une chose parmi les choses. Anonyme, dans un lieu tout aussi interchangeable, elle apparaît de dos ou en position fœtale, le corps tramé par une nature qui affirme la continuité de la vie et dont la perception sublimée du monde extérieur se métamorphose en soi.
Kalopsia (10’03 loop – 2016) / Laura Cionci & Alessandro Zangirolami (Italie)
Une lumière verte et changeante de saveur électronique remplit le regard ; simultanément, un son organique progressivement caresse l’oreille. Ainsi commence Kalopsia, une exploration d’un espace architectural et de son étroit, jamais douloureux, dialogue avec la nature pénétrante qui l’entoure. Privé de toute référence symbolique et/ou historique, l’espace est traité par les deux artistes de manière abstraite, comme lors d’un voyage cinématographique inversé. Commençant et se terminant par le même cadrage, Kalopsia place le.la spectateur.rice dans une boucle perceptible dans laquelle il est nécessaire de rester, de réfléchir et d’attendre l’apparition d’un nouvel élément spatial.

AMOUR POéSIE RéVOLUTION (2021) / Julien Blaine (France)
Poème affiché.
Je devrais commencer par l’amour fou,
c’est le plus compliqué à expliquer.
Le plus simple à l’origine
mais le plus complexe dans son et ses parcours :
confus, alambiqué, subtil
trouble et clair
caché et évident…
Alors je finirai par lui !
L’amour fou / La Poésie / La révolution (2021) / Pierre Mérejkowski (France)
Poème éparpillé.
Pas à pas’sage (miroirs) / Louis Michel de Vaulchier (France)
Poème accompagné de dessins au feutre de couleur inspirés par « Alice dans le miroir de Balthus.

The White Swan And Its Undeniable Influence On Our Culture / Colin James (USA)
Poème à entendre.